mardi 15 février 2022

À propos de MUZE HIC ! entretien - volet 2/5. avec Christian-Edziré Déquesnes et Yvon Aldigé de la revue Quoi ?. Illustration musicale : Jacques Loussier play Bach de 1996.

 

De la musique avant toute chose, [...] Et tout le reste est littérature ! - Extrait de l' Art Poétique de Paul Verlaine, Jadis et Naguère (1885).
 

- Faisant appel à plusieurs disciplines artistiques - la poésie, la musique, le mail-art Muse Hic ! peut-il être étendu à dautres arts ?

Vraiment, je n'arrive pas vraiment à comprendre le sens de cette question, sa formulation me paraît confuse ; mais voilà ce qu'elle m'inspire comme réponse. 

La poésie est partout et certes dans la littérature mais, faut-il le rappeler ?, dans la peinture, les arts graphiques, les arts plastiques, la musique, la danse... bref, partout ! 

Puis dire aussi encore que la poésie n'est pas seulement le poème, encore moins juste le poème sur le papier, le poème a à voir, je le crois, avant toute chose avec le chant, le chant de la vie, la vie célébrée, la vie transcendée, avec le profond du sacré de la vie et de la création. D'ailleurs, à mon avis, ce que Allen Ginsberg a remarquablement,  réussi à exprimer avec son grand poème Howl (1956) et j'invite ,ici, le lecteur à découvrir, redécouvrir, ce poème et à se procurer sa traduction.

Jadis, dans l'antiquité les déesses pour chaque forme d'art sont les muses et bien sûr qu'est-ce-que nous trouvons dans le mot musique ? 

En ce qui me concerne, la musique est à mon sens la forme ultime de la poésie, la musique est résolument immatérielle, nous utilisons des instruments, de la voix aux machineries électroniques, pour la créer ou la recréer (imitation du vent, de la mer... ) en organisant ou désorganisant même, du son ; cela afin d'exprimer des sentiments, des émotions, des situations, des paysages... de la vie en somme... Au final cela existe mais par delà des créations qui  demeurent au final fondamentalement invisible et définitivement matériellement impalpable à la différence d'un roman, d'un recueil de poémes, d'un tableau, d'une sculpture, d'un film sur un écran. J'en entends déjà certains me répondre, oui, mais nous pouvons écrire la musique sur une partition, l'enregistrer sur des supports disques, clef usb ou autres, sauf que les grands musiciens, interprétes par l'improvisation s'échappent de la partition et de l'écriture, de la forme provisoire de l'enregistrement, c'est vraiment comme çi avec une création musicale rien n'est jamais définitif et pouvant toujours s'évader du carcan de ce qui est établi et c'est là, et ce n'est que là que cela pour moi devient véritablement extraordinaire, créant de la poésie qui célébrer la création de la vie en s'échappant des carcans, de ce qui serait définitivement résolument établi ; c'est tout simplement merveilleux, magique, pas forcément beau et harmonieux, mais magique car en résonnance profonde avec le sacré, j'ose même écrire les sacrés, de la vie et des ses créations. Pourtant je pense aussi qu'il y a moyen d'aborder les autres formes d'expressions sous le même angle poètique mais c'est certainement bien plus complexe, sauf pour la danse il me semble. Plus complexe car un livre, un tableau, un film, une photo, un objet de création, quand il est finalisé, si on décide qu'il est finalisé (le peintre Francis Bacon disait que ses oeuvres n'étaient jamais terminées), si son créateur décide de le modifier, de le faire évoluer, il n'a pas d'autres choix, ils sont deux, de retoucher la finalisation de son oeuvre ou carrément de la refaire à nouveau mais autrement... est-ce qu'il s'agit pour autant de rejouer l'oeuvre ? En musique, en chanson, en poésie sonore ou poésie action, la danse est pour moi de la poésie action, au théatre, là, la poésie est rejouée, à partir de "la même chose" il se joue à nouveau autre chose, autre chose de vivant et de non inerte, pour illustrer mon propos j'invite à écouter et s'intéresser au travail de Jacques Loussier, un jazzman qui revisite, rejoue sans cesse depuis la fin des années l'oeuvre de J.S Bach et ce n'est jamais la même chose pourtant cela demeure la musique crée par Bach. Par ailleurs pour ces arts, cités auparavant, on utilise l'expression "art vivant", ce qui est ridicule car la littérature, la peinture, le dessin, la sculpture, la broderie, la couture, ne sont pas pour autant de l'"art mort". Ce que j'énonce, là, c'est plus de l'ordre du questionnement à partir de l'observation d'éléments factuels mais trés loin de moi de prétendre de détenir une quelconque vérité dogmatique ; néanmoins y penser, y réfléchir à tout cela me paraît intéressant pour questionner les arts et de nos jours, nos rapports à eux et nos pratiques artistiques. 

- Est-ce compatible avec le projet Muse Hic ! ?

Evidemment, c'est même, sans en avoir la conscience au départ, pour moi la base du projet Muze Hic ! C'est une humble expèrience avec des moyens fort modestes au service d'un projet artistique qui dans l'évolution de son déroulement, son développement démontre de par sa dynamique vécue et partagée que la/les musiques sans le son peuvent permettre à des acteurs d'horizons multiples, aux pratiques artistiques, techniques très différentes, d'arriver à produire collectivement une création commune, une espèce d'o.s.n.i (objet sonore non identifié) qui m'émet pas de son, de la musique muette en somme. Ici, n'oublions pas que dans le language commun et courant, nous disons tous que les mots, les couleurs parlent ; la parole c'est du son, la parole partagée ou non, compréhensible ou non, le dialogue ou le monologue, c'est de la musique, c'est de l'expression sonore de la vie et la poésie est déjà là ! non ?

Puis surtout en parallèle du projet Muze Hic ! il y a cette dynamique que j'ai parallélement instaurée d'une "exposition" qui se vit, se partage simplement et même que des nouveaux arrivants, participants, viennent y apporter leur part et enrichir la dynamique instaurée qui par bien des points elle fait plus que flirter avec le projet Muze Hic ! 

À suivre...

Patti Smith reprennant, avec des moines musiciens tibétains,  partiellement Howl d'Allen Ginsberg.

 

Du Klimt détourné pour Muze Hic ! par la mail-artiste calligraphe Anne-Elisabeth Klein.


 


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